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Loss Layers - création franco-japonaise, vidéo, musique et danse

LOSS LAYERS

A.lter S.essio

Fabrice Planquette et Yum Keiko Takayama

 

Création franco-japonaise, Loss Layers est un singulier spectacle d’une quarantaine de minutes, mêlant danse contemporaine et création virtuelle. Les artistes Yum Keiko Takayama, danseuse formée au butô, et Fabrice Planquette, spécialisé dans les installations visuelles et sonores, ont proposé cette création à la MCJP en mars dernier. Dans un cercle de lumière sans cesse mouvant, percé par des jeux graphiques et accompagné par un travail sonore très élaboré, la danseuse soumet son corps aux transformations les plus diverses, amorçant un réseau d’évocations poétiques. A l’image de son titre, il est question de la perte de contrôle dans un environnement sans cesse changeant pour ce spectacle, scindé en deux parties clairement distinctes.

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Petit bémol à cette traversée abstraite et impressionnante, le son extrêmement fort nuisit un peu à l’appréciation de la pièce chorégraphique. Cette erreur de réglage n’est malheureusement pas nouvelle à la MCJP (on se souvient de la partition électronique qui explosait dans les oreilles au bout d’une heure de théâtre kabuki), et fort regrettable pour une salle aussi bien équipée. Ce réglage, s’il ne gênait que brièvement lors d’autres représentations, a ici posé un problème aux nombreux spectateurs car la petite heure de Loss Layers s’appuie sur une texture sonore et musicale très riche, parcourue de basses, de rythmes techno, et de jeux prononcés de résonances.

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Loss Layers se construit selon une articulation dense à trois branches : celle qui s’agence entre le rythme corporel de Yum Keiko, le rythme lumineux des projections, et le rythme ondulatoire des différents sons. Entre chacune de ces couches, la création alterne les jeux de soumission / domination. Soit la danseuse se soumet aux données visuelles et sonores, jusqu’à adopter leurs caractéristiques - en ce sens, le terme de couche concerne l’enveloppe corporelle, qui s’adapte à l’image d’un caméléon. Ainsi, à la fin de la première partie, une croix grandit progressivement dans le cercle. La danseuse écarte les bras et les jambes et cherche à suivre la progression, soumise à cette extension de l’espace. Soit ces mêmes données sont remises en question par un corps qui s’impose, transgresse, tranche par sa silhouette. C’est la danseuse qui amorce la seconde partie du spectacle, puisqu’elle revient avec un autre costume, une robe d’un rouge vif qui contrecarre le noir et blanc prédominant aux jeux de lumière. Ce chassé-croisé entre les trois axes élabore le réseau d’évocations cité plus haut : corps ou espace dominé et dominant ; en contrôle ou en déséquilibre ; en lutte ou en accouplement...

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La limitation de la performance sur un cercle ne dérange nullement. Au contraire, elle permet d’éviter la démesure du projet, et impose en même temps une concentration extrême - de même que les quarante minutes sont denses. Un spectacle trop long nous aurait abrutis ; un trop vaste nous aurait perdus. La richesse concentrée de Loss Layers permet la mise en place d’évocations diverses. C’est bien cela, en danse contemporaine, et bien plus en danse butô, travailler sur des expressions du corps à la fois fortes, marquantes ; mais dont les significations se diluent. Une fonction cathartique claire se détache dans le spectacle, en particulier lors de la seconde partie qui évoque des possessions religieuses et des postures horrifiques. A l’inverse, les premières vingt minutes reflètent - ou font songer - au monde technologique, voire robotique. La rapidité des lumières, projetées en rafales, et l’agressivité sonore construisent une sphère où tout se joue sur le rythme, la répétition, l’efficacité, la performance. Le corps de Yum Keiko s’y soumet, traversé de sursauts, de gestes machiniques, d’une connectique invisible.

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S’il existe certes des moments où la création musicale comme la dynamique des projections et de la chorégraphie nous “secouent”, presque littéralement, par la violence qui se trouve là incarnée physiquement, sensoriellement, il persiste aussi une beauté poétique. Celle-ci est dûe à ce corps musclé et fascinant par ses nombreuses transformations de Yum Keiko ; ainsi qu’à ces nombreuses percées de certains sons, de certaines lumières qui hantent longuement. Au cours de la seconde partie de la pièce, la danseuse se lève pour observer des taches de lumière qui se multiplient au sein de l’obscurité, tandis que résonnent quelques sons de cloches, au rythme des pas lancinants de l’humain isolé sur ce cercle. Dans cet univers bruissant et sans cesse mouvant, il est au final aussi question de solitude, de retrouvailles avec son propre soi. ces moments qui filtrent entre le bruit et fureur, ce sont les plus émouvants de cette création.

 

 

La présentation du spectacle sur le site de la MCJP

Quelques extraits :


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