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Kiki la petite sorcière

Le chat, la mer et le ciel 

Kiki la petite sorcière

Un film de Hayao Miyazaki

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Merci à Fanny pour le DVD !

J'avais découvert Kiki la petite sorcière lors de sa sortie en France en 2004. Le film (qui date de 1989) avait été brillamment restauré et était ressorti dans les salles françaises, à l'instar d'une série d'autres inédits, comme Le Château dans le ciel et Nausicaa de la Vallée du Vent. Je le redécouvre en DVD, avec toujours autant de bonheur. 

Kiki est une petite fille qui, pour devenir sorcière, doit montrer son potentiel en partant durant une année dans une ville étrangère et se faire accepter par les habitants. A travers ce postulat enfantin, Miyazaki brosse le portrait d'une jeune fille au bord de l'adolescence, qui se découvre à travers ce parcours initiatique. La vivacité de l'animation et les personnages colorés allègent le dureté du propos, qui partage les affres et doutes de la fillette qui découvre un monde pas si rose et agréable que la charmante maison de ses parents.

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kikijiji.jpgLe Chat

Sur chacune de ses apparitions, Jiji apparaît auprès de Kiki. Jiji et Kiki, deux noms pétillants de protagonistes qui forment un duo contradictoire constituant une bonne partie de l'humour du film. Jiji, amer, ne cesse de critiquer la ville et d'abattre les illusions de sa sorcière par ses répliques cinglantes, méfiant comme un chat de gouttière. Le chat n'a pas la langue dans sa poche, donnant lieu à des séquences hilaranteskikiparents2.jpg comme ses rencontres avec un énorme chien bougon ou le boulanger muet chez lequel loge Kiki. Cependant, c'est ce premier détail qui révèle les changements de la petite sorcière. Jiji est tout d'abord une accroche à la terre de ses parents, un héritage de l'enfance dorée et la preuve de ses origines de sorcière. Le compagnon de tous les instants, qui la suit sur une bonne partie du film, découvrant la ville et ses habitants avec elle, ne peut soudainement plus lui parler, se sensibilisant au langage bien plus félin de la voisine d'en face. Lorsque Kiki s'aperçoit qu'elle ne peut plus lui parler, elle perd de sa confiance en elle tout en se détachant de sa dépendance d'origine, se confiant à d'autres qu'à lui.

 

kikimer.jpgLa Mer

Kiki a le coup de cœur face à la ville car elle y est émerveillée par la mer. Tout comme dans Le Voyage de Chihiro, cette mer est synonyme de beauté mystérieuse, large et vaste, isolant la cité des Bains ou la ville adoptée par la sorcière. Celle-ci est en contraste avec la maison bien abritée derrière les arbres de ses parents, où sa mère s'active dans la serre, sphère protectrice du reste du monde. Les décors jouent toujours un rôle primordiale dans les films des studios Ghibli et la ville en bord de mer de Kiki n'en est pas exempt. Parallèle à celle où habitent Sosuke et sa mère danskikiville.jpg Ponyo sur la Falaise, elle a des abords charmants, une ambiance colorée tout en révélant ses caprices. Kiki découvre les complications d'une circulation complexe lorsqu'elle traverse les rues en balai, manquant de provoquer un grave accident. La sorcière n'a pas sa place dans ces rues animées, parmi ces voitures et camions agités. Elle découvre ainsi le monde urbain et ses caprices, l'hospitalité et le rejet. Une boulangère enceinte jusqu'au cou l'accueille à bras ouverts tandis que des jeunes filles fardées de son âge pouffent sur son passage. Comme toujours, tous les personnages rencontrés dans ce film de Miyazaki sont capables de révéler une certaine cruauté discrète sans jamais être condamnés ou perdre de leur candeur.

 

kikivol2.jpgLe Ciel

Le ciel, l'action. Le film sait rythmer les moments de calme et ceux d'agitation, entre action et réflexion, quête initiatique et divertissement maîtrisé. Il parvient à retranscrire, grâce à l'animation impeccable, la sensation d'onirisme et de vitesse lors des séquences de vol, que ce soit lors du voyage à balai, de la traversée dans la ville, du parcours sur l'autoroute à vélo, ou encore lors du final avec le dirigeable. On reconnaît l'amour de Miyazaki pour les machines de vol, passion qui rythme ses films : l'engin de Nausicaa, l'avion rouge dans Porco Rosso, les dirigeables des pirates du Château dans le ciel ou le dragon dans Le Voyage de Chihiro. Le balai trouve ainsi aisément sa place dans la filmographie du grand maître. Par les scènes dans le ciel, l'agressivité du vol ou du vent se révèle tout autant que son agréable impression. Certaines séquences sont même très impressionnantes et inquiétantes (l'attaque des corbeaux, le suspense lorsque le dirigeable s'effondre sur la ville). Tout comme le chat, l'action de voler est un élément caractéristique à la sorcière et révélateur des troubles qui agite une fille aux bords de l'adolescence. C'est la disparition de son don qui inquiète Kiki et indique les changements de son corps et de son esprit qu'elle ne comprend pas.

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Le film passe ainsi habilement par les accessoires de la sorcière, loin de l'image surnaturelle habituelle, pour transfigurer les failles et les doutes qui agitent toute jeune adolescence face à la cruauté des hommes, le fonctionnement d'une communauté, l'ambition et la peur de décevoir dans cette ville. Parcours initiatique transporté par la robe noire et les yeux malicieux et naïfs de Kiki, son chat noir aux grands yeux sur ses épaules, Kiki la Petite Sorcière est, à l'instar d'Arietty, un film sur les angoisses de l'adolescence, frais et grave, subtil et agréable. 

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