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Arietty le petit chapardeur

ARIETTY LE PETIT CHAPARDEUR - Hiromasa Yonebayashi

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Adapté du conte de Mary Norton, Arietty le petit Chapardeur explore avec brio l’infiniment grand et infiniment petit, œuvre enfantine qui révèle derrière les éléments les plus simples leur complexité et leur richesse insoupçonnée. Dans ce monde, les plus faibles, par exemple le personnage de Sho, jeune garçon malade, ou de son inoffensive grand-mère  deviennent les plus effrayants pour la famille d’Arietty. L’humain ou d’autres animaux tels le chat ou le corbeau, sont vus comme des géants, voire des monstres ; ce que l’animation parvient merveilleusement à retranscrire. Le début du film concerne l’arrivée du jeune homme, les images étant adaptées à sa taille. Son regard, qui suit d’abord le paysage, puis s‘élève vers le haut, révèle le vrai sujet du film lorsqu’il s’abaisse vers le bas, attiré par le comportement étrange du chat près d’une fleur. Dès lors, c’est la regard du jeune garçon qui permet la découverte d’Arietty, phénomène d’identification à un enfant brusquement mis en face d’un être merveilleux. Le reste du film s’attache cependant ensuite à Arietty et à son évolution, Sho n’étant finalement qu’un intermédiaire, un moyen de soulever les herbes et de regarder,  le temps d’un récit d’une heure vingt, vers le bas, nous qui sommes si habitués à regarder vers l’avant et le dessus de nos têtes. Le film ne s’en limite pas à ce choix de point de vue : il est, comme tous les récits de Miyazaki, une ode à la simplicité, au retour aux valeurs et aux choses les plus simples et communes.

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Cependant, le film apparaît déjà comme un grand récit d’aventure, joliment rythmé et au charme toujours aussi irrésistible. Un récit d’aventure, certes, mais à petite échelle. C’est le coup de brio du réalisateur et du scénario de Miyazaki : réussir à donner à cette légende d’être minuscules la force et l’originalité nécessaires pour divertir. Tout un univers microscopique est reconstitué, où l’œil peut se délecter des astuces déployées par la famille pour se construire un intérieur semblable à celui des humains, mais en dix fois plus réduit. La multiplicité des détails ravit, les couleurs chaudes et végétales harmonisent une demeure marquée par la chaleur, la joie de vivre, la simplicité, donnant sa place au spectateur malgré sa taille réduite. Le plus simple et méprisant des objets de tous les jours y acquiert une valeur précieuse et nouvelle : un mouchoir en papier constitue un drap de choix, l’épingle se révèle épée, le morceau de sucre reste convoité, les feuilles de laurier parfument et embellissent la maison, la cuisine de poupée devient un véritable trésor. Le film semble vouloir faire prendre conscience de la valeur des choses, et prôner un retour intelligent au matériel, à travers l’humilité de personnages ponctuant tous les films des studios Ghibli.

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La simplicité se retrouve aussi dans une unité de lieu et de temps : chaque déplacement devient un long parcours tortueux dans les recoins de la maison, le moindre geste se retrouve amplifié et complexifié par la différence de taille. De nombreux panoramiques substituent la vision humaine du spectateur à celle extraordinaire d’Arietty : le jardin est une vraie forêt peuplée d’insectes monstrueux (certaines scènes font écho aux créatures croisées par l’héroïne de Nausicaa de la Vallée du Vent) ; les tuyauteries de la maison de longs couloirs obscurs ; les meubles des pièces deviennent d’immenses falaises. Le trajet effectué au début du film avec le père, sorte de baptême de chapardeur pour la jeune fille, imprime une certaine tension tout du long, de même que le sauvetage de la mère, amplifié par le visage monstrueux de l’aide-ménagère, une réplique modeste de la sorcière Yubaba de Chihiro.

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Enfin, ce charmant long-métrage continue de diffuser en filigrane les valeurs toujours défendues par Miyazaki et les productions Ghibli, cette sorte de sagesse jamais didactique doucement soufflée à l’oreille des spectateurs. Le sens de la famille s’impose dans le trio que forme Arietty avec son père et sa mère, celle-ci, notamment, très drôle, donne lieu à une angoissante scène de disparition, tel un écho à l’angoisse de Sousuke lorsqu’il retrouve la voiture vide de Lisa dans Ponyo sur la Falaise. La nature joue bien évidemment un rôle primordiale, et ce, à travers un court discours écologique (qui aurait peut-être pu ne pas être présent…) qu’adresse Arietty au garçon malade. Une vie saine et paisible est prônée à travers le périple d’Arietty, en contraste avec les dissensions entre les deux peuples. La cruauté de la bonne et la méfiance paranoïaque des chapardeurs pour les humains rappelle les ségrégations entre les êtres de la forêt les humains de Princesse Mononoke.

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Enfin, tout comme pour Ponyo, Arietty le Petit Chapardeur dévoile de manière amusante les premiers émois amoureux de son protagoniste. Elle n’ose se montrer au jeune garçon, celui s’assimilant plus à une pudeur de jeune fille plutôt qu’à la frayeur d’être vue par un humain. Elle rougit et frisonne lorsqu’elle aperçoit le regard masculin fixé sur elle et se cache derrière un mouchoir ou une branche d’arbre. Ses émois vont de pair avec sa vivacité et sa révolte, son désir de découverte mais aussi de désillusion, très proche en cela du personnage de Kiki. Arietty le Petit Chapardeur fait parti de ces œuvres enfantines du studio Ghibli qui, avec Kiki la Petite Sorcière, Mon Voisin Totoro ou Ponyo sur la falaise, effleurent avec justesse les désirs de l’adolescence.

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