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The Grandmaster

THE GRANDMASTER – Wong Kar-wai

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Autant le nouveau film de Wong Kar-wai m'a séduite par son esthétique dont je me méfie habituellement, autant son scénario ne m'a pas convaincue. Alors que la forme visuelle et le travail photographique et sonore du cinéaste hongkongais trouve une nouvelle ampleur avec l'histoire d'Yip Man et du kung-fu, les choix de récit et de montage se révèlent confus, peu à peu lassants et creux.

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Qu'a voulu faire Wong Kar-wai avec The Grandmaster ? Raconter la vie du grand maître ? Montrer sa gloire, puis sa déconstruction face à l'invasion de l'armée japonaise ? Donner une histoire plus générale des différents types d'arts martiaux ? S'attacher à la figure de la fille du grand maître, attirée par la modestie de Ip Man ? Etre dans la fresque ou dans l'intime ? Autant d'intrigues et de choix d'écritures qui ne cessent de se frôler tout du long de The Grandmaster, uniquement unifiés par la forme, exquise, du film.

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Si Wong Kar-wai a voulu dresser le portrait de la diversité des arts martiaux et se frotter à tout style de combat, cette intention trouve son apogée durant la séquence dans la maison close, autant un lieu de plaisir qu'un espace dédié aux rencontres entre les grandes écoles. Superbement filmé, la séquence fait gravir, au sens propre, les échelons d'un art martial à un autre, mêlant la démonstration à l'épique. Dans cette scène, les intentions de Kar-wai apparaissent et cette alchimie fonctionne admirablement. Or, par la suite, en particulier sur la période de l'invasion japonaise, les rares indications historique délivrées ne suffisent pas à appréhender le reste de l'histoire et à comprendre sa direction. En résulte une succession de séquences tout aussi bouleversantes dans la forme qu'incompréhensibles dans le fond. Le protagoniste mystérieux de La Lame, joué par Chang Chen, donne ainsi lieu à une troublante séquence de rencontre dans un train et à un combat épique dans la rue, mais ne se trouve qu'effleuré dans le récit, jouant plus un rôle en toile de fond.

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Si le choix de Tony Leung devient presque un classique chez Wong Kar-wai, sa sobriété marquée et son charisme naturel étant les deux ressorts clés de ses personnages, et en l'occurrence parfaits pour incarner Yip Man, le choix de Zhang Ziyi, pourtant un personnage secondaire, se révèle bien plus audacieux et étonnant. Le fait est que l'écriture de la fille du Maître Gong présente bien plus d'ambivalence que l'intègre Yip. Zhang Ziyi incarne ainsi un personnage aux antipodes de ceux – bien plus niais et sans réelle profondeur – de ses précédents films, et réunit plusieurs questionnements sur l'héritage et la vengeance. La beauté de l'actrice est traitée dans la tonalité d'une grande froideur qui atteindra sa force avec la séquence dans la neige près d'une voie de chemin de fer. Cette froideur et cette épure concernant la mise en scène du personnage transmettent une forme de dignité chez Kar-wai, et déclenchent bien plus d'émotion que pour le malheur vécu par Yip Man, dont le destin familial est totalement éclipsé du film.

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Plus intéressant, enfin, se révèle le choix esthétique apporté aux séquences de confrontation. Kar-wai y semble fusionner deux styles auparavant distingués dans le cinéma d'action chinois, réunissant à la fois Bruce Lee et Tsui Hark. En effet, si le film met en scène le maître du wing chun, l'art martial qui a fait la renommée de Yip Man et de son élève Bruce Lee à Hollywood, les combats au corps au corps sont filmés comme des séquences de wu xia pian, d'affrontement au sabre. L'esthétique développée autour du mouvement, de la virevolte et du prolongement des membres du corps atteint presque une dimension surnaturelle et fantastique. Ce renversement se révèle impressionnant et aurait pu atteindre une véritable ampleur si l'écriture globale du film s'était révélée plus cohérente.

Commentaires

  • Je suis tout à fait d'accord avec ta critique. J'ai trouvé le film très morcellé, rendant l'histoire parfois difficile à suivre.

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