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2/Duo

Une Répétition qui implose

2/DUO – Nobuhiro Suwa (1996)

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2/Duo, un film datant de 1996 mais qui s'avère encore incroyablement pertinent aujourd'hui.

2/Duo est une forte surprise. Réalisé avec de petits moyens, se limitant à l'observation d'un jeune couple implosant peu à peu, le film de Nobuhiro Suwa réussit à cerner, avec justesse et précaution, une forme de schizophrénie que beaucoup de cinéastes représentent en traits grossiers ou symbolisme forcé. Nobuhiro Suwa réussit à cerner, dans un registre plus réel et une esthétique plus documentaire, l'ambiguïté de la schizophrénie, sans tomber dans le pathétique ou la facilité. Le film réussit là où d'autres, comme Darren Aronofski avec Black Swan, ont échoué : laisser une marge de liberté à la folie de ses personnages, et ne jamais limiter leur caractérisation à une unique lecture psychologique. Le choix du plan-séquence donne, en ce sens, une véritable force et épaisseur à la névrose, et lui confère sa part obscure et incompréhensible. La mise en scène fine et le jeu, brillant, des acteurs donnent à la schizophrénie sa part d'insaisissable et d'étrangeté, semant toujours un doute progressif chez le spectateur. Le petit appartement réconfortant du début se transforme peu à peu en bulle étouffante, où implose peu à peu le couple, qui se déchire, se répète, se sépare à travers d'infimes indices ou dialogues.

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Car c'est là toute la force de 2/Duo : comment incarner, à l'écran, par la mise en scène, les choix de réalisation, cette idée si implicite de l'implosion. L'esthétique documentaire saisit les moments de doute ou de désoeuvrement des personnages, le cadre étant toujours volontairement décalé. Les personnages ne sont jamais totalement montrées, toujours cachés derrière un pan de mur, une fenêtre, une mèche de cheveux. En outre, le rapport à la répétition dans les dialogues, mais également dans les gestes, traduit un aspect névrotique fortement dérangeant. Dans l'une des séquences, le jeune homme lance rageusement le linge étendu dehors sur sa femme, jetant chaque vêtement à sa figure dans une violence progressive. Cette implosion n'est cependant pas sans lien avec le monde extérieur, qui apparaît bien souvent morcelé, presque sans identité, contribuant à cloisonner encore plus les personnages avec eux-mêmes.

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Mais ce déchirement ne se départit pas d'une certaine poésie ou d'un certain lyrisme. Le personnage de la jeune femme (Yu Eri), en particulier, est filmé de manière à ce qu'il finit par échapper au regard du cameraman, parallèlement à celui de la société, alors qu'il semblait être le plus ordinaire et familier au départ. Yu, après sa disparition hors de la narration et du cadre, réapparaît changé, libre, insaisissable parmi les herbes folles, mais d'une réelle beauté mystérieuse.

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